Dans un entretien accordé au journal Le Messager, Ambroise Oyongo Bitolo essaie d’étaler au grand jour certains mots qui minent nos équipe nationales notamment les lions indomptables A
Avant toute chose, dites-nous comment vous abordez le début de saison à Montpellier ?
Je tiens d’emblée à dire que Montpellier c’est un grand club, un club qui m’a permis de faire ce que j’aime le plus. C’est-à-dire jouer au ballon, jouer au football librement, pleinement. Nous avions fait une longue préparation estivale en mon absence car j’étais à la Can. Mais j’ai pu rejoindre le groupe à temps pour rapidement m’intégrer. Au cours des six rencontres que nous avons disputées pendant cette période nous avons remporté deux notamment, le match contre Gironna en Espagne. Le plus difficile en moment, est la perte de nombreux cadres de l’équipe au profit du mercato et plusieurs de nos joueurs sont également blessés.
A quoi sont dus les départs au sein de votre effectif ?
C’est juste le fruit d’une très belle saison. Au cours de cette dernière saison, nous avons des joueurs qui se sont démarqué et le mercato vient en quelque sorte récompenser leurs efforts. Notamment notre gardien de but Benjamin Lecomte qui a fait une grosse saison. Laquelle saison lui a valu son départ pour Monaco. En outre, nous avons d’autres qui en manque de temps de jeu, souhaitent aller vers d’autres horizons pour exprimer leur talent sur le terrain.
Aviez-vous reçu des propositions alléchantes au cours de ce mercato ?
Je pense que j’ai été fermé. Pour tout dire, j’ai voulu resté à Montpellier une saison de plus, après avoir fait une saison de blessure. De retour de blessure, j’ai pu faire une saison pleine et j’estime avoir encore beaucoup à donner pour cette belle équipe.
C’est dire que vous vous sentez bien en Ligue 1 ?
Bien sûr. Ce championnat représente une très belle vitrine et il est par ailleurs le meilleur championnat en termes de détection de jeunes talents et de formation. Nous avons par exemple le jeune Nicolas Pépé qui était à Lille la saison dernière et qui est aujourd’hui à Arsenal. Entre outre, nous avons Nabil Fekir parti de Lyon pour le Bétis Séville et bien d’autres.
Nous constatons que vous faites un bon retour en club, c’est dire que vous avez déjà oublié cette élimination précoce des Lions indomptables à la Can 2019 ?
Bien sûr que non. Cela a été pour nous un moment très difficile à vivre. Mais le football est un sport. Donc, le but premier est d’avoir un vainqueur, donc il y a des moments où nous sommes appelés à gagner et d’autres pas. C’est la triste réalité et maintenant la seule issue est de tourner la page et de rapidement se mettre en question.
C’est dire que vous partagez la déception du peuple camerounais ?
Evidemment que je la partage. Je la ressens dans ma chair. Et c’est encore plus sensible car le peuple camerounais est un peuple habitué aux victoires à l’instar de 2017, mais il faudrait savoir digérer quand ce n’est pas le cas et savoir que nous joueurs sommes les premiers concernés par cet échec.
Qu’est-ce qui a manqué à cette équipe pour défendre valablement son trophée en Egypte lors de la Can 2019 ?
Déjà au départ, nous avions ce problème de primes. Quant à la veille d’une compétition des soucis de primes ressortent, cela fragilise le groupe. Un gros manque de cohésion s’installe aussitôt au sein du groupe. Autant du côté des joueurs que du staff technique. En plus, je crois qu’au niveau de la Fédération camerounaise de football, toutes les dispositions n’avaient pas été mises en jeu pour respecter la nation camerounaise et l’équipe nationale que nous formons. Donc, de nombreux problèmes extra-sportifs ont contribué à cette débâcle en Egypte.
Quel est le vrai problème au niveau de primes au sein de la tanière ?
Le vrai problème est lié au manque de cohésion entre le ministère des Sports et de l’éducation physique, la fédération, et les joueurs cadres de l’équipe à savoir le capitaine et ses adjoints. Le souci de primes est mis sur la table six mois avant comme le prévoient le décret du Chef de l’Etat. Mais dans notre cas, c’est une semaine avant notre départ que cela est mis à l’ordre du jour. Nous avons fait un rapport avec les différentes doléances liées à notre déplacement et c’est une semaine avant le coup d’envoi de la Can que certains ont trouvé bon de répondre, ceci au mépris des hommes que nous sommes et des institutions que nous représentons. De ce fait, tant que cette situation chaotique ne changera pas, les résultats de l’équipe iront probablement de mal en pire.
La Fédération camerounaise de football sous instruction du ministre de l’Education physique et des sports a limogé le sélectionneur au lendemain de votre retour d’Egypte. Pensez-vous que ce soit la solution aujourd’hui pour le football camerounais ?
Moi je trouve que ce n’est pas un problème propre au Cameroun, mais il est plutôt général. Limogé un entraineur précocement ne saurait résoudre un problème. Déjà nous avions remporté la Can en 2017 et après il a été limogé. Par la suite, le résultat a été médiocre. C’est dire qu’il faudrait permettre aux entraineurs de pouvoir s’exprimer au cours d’un délai assez conséquent. Permettre à chaque entraineur d’implémenter une idéologie et plan tactique au sein du groupe qu’il dirige. Surtout permettre à chaque entraineur de faire le choix de son effectif de façon indépendante.
Certains accusent Clarence Seedorf d’avoir manqué d’autorité au sein du groupe, qu’en pensez-vous ?
Seedorf comme joueur, a été exceptionnel. Donc, de part ce statut-là, il serait impossible pour lui d’avoir un problème d’autorité. Mais, je pense modestement qu’il lui a manqué un peu plus d’expérience et surtout une bonne connaissance du football africain. Car pour une compétition comme la Coupe d’Afrique des nations, il est idéal d’avoir des guerriers, car c’est un mois de lutte acharnée.
Quels sont vos rapports avec Samuel Eto’o et est-ce que sa présence au sein du groupe lors de cette Can a eu une incidence sur les joueurs ?
Je n’ai aucun rapport avec Samuel Eto’o. Certainement pour d’autres, savoir qu’il était présent a eu un impact. Mais en ce qui me concerne, quand je vais à une compétition, je ne pense qu’à jouer et à donner le meilleur. Du coup, ceux qui viennent tourner autour, n’a pas d’impact sur moi. En outre, du haut de mes huit ans au sein du groupe, je pense avoir vécu tellement d’événements qui ont déjà forgé ma personne, contrairement à nos jeunes joueurs. Il faudrait dès lors savoir que je ne porte pas un joueur en particulier en cœur. C’est le Cameroun que je porte en cœur.
Vous avez été à la tête d’un mouvement d’humeur au sein de la tanière au cours de cette Can. Quel en était le mobile ?
C’était le manque de respect de la hiérarchie à l’endroit de cette équipe. Et je puis vous dire que certains de nos valeureux joueurs ne viendront probablement plus au sein de cette équipe au vu de l’incompétence et de la mauvaise foi des dirigeants de notre football. Nous avons aujourd’hui de nombreux joueurs qui ont été frustré par cette mauvaise gestion et qui ne souhaitent plus revenir. Rien à voir avec cette histoire de patriotisme que l’on essaie de leur coller sur le dos.
Si cette grève était à refaire est ce que vous le referiez ?
Bien évidement. Le fait est que ce combat, nous le menons pas seulement pour nous, mais c’est pour permettre à la nouvelle génération de pouvoir travailler dans un environnement sain où respect et rigueur seront de mise. Donc, si en 2021 rien n’est fait avant, nous ferons exactement la même chose et voir mieux encore. Cette grève, en dépit de ce que certains pensent, n’avaient rien à voir avec un besoin d’argent, mais l’objectif était de dire que les joueurs méritent du respect. En plus, je pense bien que tout travail mérite un salaire. Honnêtement cette situation a été incroyable au point où je me pose des questions sur mon retour en sélection. Je ne pense pas pouvoir revenir au sein de cette tanière pleine de vices.
L’utilisation de votre baffle (Woofer) au sein de l’équipe a fait couler beaucoup d’encre, que représente-t-il pour vous ?
Ce baffle représente la Can 2017. C’est le symbole de la victoire et de l’unité. Déjà, toutes les équipes aujourd’hui ont des instruments de musique au sein de leur effectif. Il permet de se retrouver et créer une saine émulation au sein du groupe et de détendre l’atmosphère en compétition. Au Cameroun c’est Oyongo Bitolo et ailleurs comme en France, c’est Presnel Kimpembe et d’autres.
Si vous n’aviez pas été footballeur, quel aurait été votre métier ?
Danseur sans aucun doute. Déjà tout petit j’étais très bon danseur et je pense l’être toujours au jour d’aujourd’hui. Donc la musique et la danse font partie de moi.
Quel serait la formule miracle pour conserver cette Can 2021 au Cameroun ?
La formule est très simple. Patriotisme, rigueur et respect. Il faudrait déjà que nos dirigeants apprennent à respecter les joueurs et doivent tout faire pour créer des conditions favorables au succès. En outre, l’idéal serait trouver un entraîneur maintenant pour lui permettre d’avoir assez de temps pour former une équipe compétitive et implanter un style de jeu qui lui sera propre.
Source : Le Messager