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Alucam : Hémorragie financière, Proalu en bouée de sauvetage

Malgré 23,7 milliards de pertes en 2024, Alucam refuse de tirer sa révérence. Son plan de survie ? Un contrat vital avec Proalu et la quête désespérée d’un investisseur-provident. La dissolution rôde, mais l’espoir (ténu) subsiste.

La Compagnie Camerounaise d’Aluminium (Alucam) continue d’accumuler les pertes. Selon les états financiers 2024 consultés par Investir au Cameroun, la société a enregistré un résultat net déficitaire de 23,7 milliards de FCFA, légèrement supérieur à celui de 23,6 milliards en 2023.

Une décennie de déficits persistants

Ces contre-performances s’ajoutent à une longue série de déficits enregistrés depuis plusieurs années : -23 milliards de FCFA en 2019, -14 milliards en 2020, un léger redressement en 2021 avec un bénéfice de 447,9 millions, avant de retomber dans le rouge en 2022 avec une perte de 8 milliards. Une trajectoire globalement marquée par la contraction de l’activité et la persistance de charges d’exploitation élevées.

En 2024, le chiffre d’affaires s’est établi à 94,4 milliards de FCFA, en baisse de 10 % par rapport aux 105,3 milliards de 2023. « La baisse du chiffre d’affaires est due à l’indisponibilité de l’outil de production », précise le rapport. En parallèle, les charges demeurent lourdes. Les achats de matières premières et fournitures se sont élevés à -52,2 milliards de FCFA en 2024, en recul de 20 % par rapport aux -65,3 milliards de 2023. Les autres achats ont également baissé de manière notable : -29,6 milliards en 2024 contre -35,6 milliards en 2023 (-16,8 %). Quant aux charges de personnel, elles restent élevées, à -8,9 milliards de FCFA, en légère hausse de 1,8 % contre -8,7 milliards en 2023.

Des capitaux propres en chute libre et un risque de dissolution

Les déficits chroniques creusent davantage le gouffre des capitaux propres. « Le déficit des capitaux propres s’est accru depuis plusieurs exercices. Les difficultés financières que traverse la société sont susceptibles de jeter un doute important sur sa capacité à poursuuer son exploitation », souligne le rapport des commissaires aux comptes.

Depuis 2019, les capitaux propres sont devenus inférieurs à la moitié du capital social, et depuis 2020, ils ont basculé en territoire négatif. « Conformément aux dispositions des articles 664 et 665 de l’Acte uniforme OHADA, le Conseil d’administration devait convoquer, dans les quatre mois suivant l’approbation des comptes ayant fait apparaître cette situation, une assemblée générale extraordinaire à l’effet de décider si la dissolution anticipée de la société devait avoir lieu. L’assemblée générale extraordinaire convoquée au cours de l’exercice 2020 n’avait pas prononcé la dissolution de la société », rappellent les commissaires aux comptes.

Malgré une tentative de reconstitution via un écart de réévaluation de 11 milliards en 2022, la spirale déficitaire s’est poursuivie : -28,3 milliards en 2023. Au 31 décembre 2024, le déficit des capitaux propres atteint -52,2 milliards de FCFA. Le délai accordé à la société pour reconstituer ses capitaux propres – fixé au 31 décembre 2022 – étant désormais écoulé, les auditeurs attirent l’attention sur un risque juridique majeur : « tout tiers intéressé pourrait demander la dissolution de la société », préviennent-ils.

Un pari sur un nouvel investisseur et l’appui de Proalu

Pour éviter ce scénario, Alucam mise désormais sur l’arrivée d’un nouvel investisseur capable d’injecter des fonds frais. Des discussions sont en cours avec plusieurs partenaires, mais aucune conclusion n’a encore été annoncée. « Des procédures demeurent en cours pour la recherche d’un nouvel investisseur pouvant injecter des capitaux et, partant, un souffle dans la société », souligne le rapport.

En attendant, l’entreprise s’appuie sur un contrat signé en août 2024 avec Proalu. Ce dernier garantit l’achat de 2 500 tonnes de matière première par mois, représentant environ 4 milliards de FCFA de revenus mensuels, soit 48 milliards par an. « Les comptes « clients avances » reçues connaissent une forte variation, à cause de l’avance versée par Proalu à hauteur de 9 850 MFCFA », précise le document. Cet accord sécurise une partie du chiffre d’affaires et apporte une bouffée d’oxygène à ce fleuron historique, autrefois symbole de la modernité industrielle camerounaise, aujourd’hui fragilisé par une décennie de pertes.

Rappelons que la Chambre des comptes, dans un rapport publié en avril 2024, avait déjà souligné l’« impératif » d’une recapitalisation de 43 milliards de FCFA pour remettre à niveau l’outil de production et permettre à Alucam de retrouver un rythme annuel de 110 000 à 120 000 tonnes d’aluminium primaire.

Gérald Nyatte

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