Input your search keywords and press Enter.

FAO : le Dg Qu Dongyu donne son opinion sur les forêts

Selon le Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), les forêts sont considérées comme ces «épiceries de la nature» qui agissent comme des filets de sécurité et contribuent à mieux nourrir l’humanité.

07 August 2019, Rome Italy – Official portrait of FAO Director-General Qu Dongyu. FAO headquarters.

« Nos forêts sont une source d’alimentation vitale pour la population mondiale. Que ce soit grâce aux aliments, à l’eau douce, aux abris ou encore à l’énergie qu’elles fournissent, les forêts assurent la subsistance de milliards de personnes en plus de garantir la préservation de la biodiversité.
Pourtant, nous continuons de les décimer à un rythme alarmant du fait de nos activités qui entraînent la déforestation et la dégradation des terres. De 2015 à 2020, ce sont quelque 10 millions d’hectares de forêts, soit une superficie à peu près équivalente à celle de la République de Corée, qui ont été détruits chaque année. Parallèlement, la multiplication des incendies de forêt et des infestations de ravageurs menace encore davantage ces écosystèmes d’une valeur inestimable.
Des études ont montré que la nécessité de répondre aux besoins d’une population mondiale croissante constitue l’un des principaux facteurs sous-jacents de la déforestation. Alors que nous célébrons la Journée internationale des forêts sur le thème «Forêts et aliments», nous devons chercher d’urgence des moyens de garantir la sécurité alimentaire de tout un chacun, tout en protégeant ces maillons indispensables de nos systèmes agroalimentaires que sont les forêts.
La clé réside dans l’adoption de solutions qui associent agriculture et forêts.
Nous pouvons rendre nos territoires plus productifs en misant sur l’intensification durable, les systèmes de production intégrés et les économies circulaires. Grâce à l’alliance de l’innovation et des connaissances traditionnelles, nous pouvons limiter l’expansion des terres arables tout en parvenant à produire les denrées alimentaires dont nous avons besoin.
À Vanuatu, par exemple, un projet innovant permet d’améliorer les récoltes dans les jardins inondés traditionnels grâce à l’intégration de nouvelles technologies, pratiques et variétés végétales, qui favorisent la gestion durable de l’eau et des forêts dans une région où la détérioration des forêts avait réduit la capacité d’approvisionnement en eau. Il a ainsi été possible de diminuer le gaspillage de l’eau et d’accroître les disponibilités hydriques, ce qui a contribué à recharger les sources d’eau servant à la culture du taro, un aliment de base qui joue un rôle important pour l’alimentation des populations locales et la sécurité alimentaire du pays.
En Tunisie, un projet a été mis en œuvre par la FAO en collaboration avec des partenaires pour réensemencer des terres dégradées avec une légumineuse locale adaptée au pâturage du bétail et pour régénérer divers arbustes et arbres locaux, tels que l’arroche, le caroubier, la luzerne arborescente et le figuier de Barbarie, qui contribuent aux moyens de subsistance tout en apportant de l’ombre aux cultures et une source supplémentaire de fourrage aux animaux. Résultat, le coût de l’alimentation du bétail sur le site restauré a pu être diminué par deux.
Ces exemples nous montrent comment l’association des forêts, des arbustes et des herbages avec de nouvelles cultures peut améliorer la production alimentaire.
Les forêts fournissent des habitats aux pollinisateurs et abritent la majeure partie de la biodiversité terrestre de la planète. Or, nous avons besoin tout autant des pollinisateurs que de la biodiversité pour augmenter la production alimentaire et promouvoir un environnement plus durable.
Les forêts nourrissent les sols, régulent la température et offrent de la nourriture et de l’ombre aux animaux d’élevage. Elles protègent les cultures en agissant comme une barrière naturelle contre le vent et approvisionnent en eau douce plus de 85 pour cent des principales villes du monde.
Constituant une source directe de légumes, de fruits, de graines, de racines, de tubercules, de champignons, de miel, d’herbes naturelles et de gibier riche en protéines pour les populations rurales ainsi que d’aliments fonctionnels dans les zones urbaines, les forêts sont de véritables «épiceries de la nature». Et ceci est d’autant plus vrai en temps de crise, lorsque les forêts servent de filet de sécurité alimentaire d’urgence.
L’agroforesterie, c’est-à-dire l’alliance des arbres et des cultures agricoles, peut permettre d’améliorer les écosystèmes, de renforcer la résilience des cultures, de restaurer les terres dégradées, d’accroître la production et la diversité alimentaires et d’augmenter les revenus des agriculteurs.
Les systèmes sylvopastoraux, qui associent la plantation d’arbres et la restauration de la végétation au pâturage et à la culture fourragère, jouent également un rôle important.
Il n’en demeure pas moins qu’il nous faudra intensifier nos efforts si nous voulons remettre en état les plus de 2 milliards d’hectares de terres que l’on estime dégradées dans le monde. Heureusement, environ 1,5 milliard d’hectares de ces terres se prêtent à une restauration en mosaïque, qui consiste à associer des forêts et des arbres à l’agriculture.
Un milliard d’hectares supplémentaires de terres cultivées, qui étaient autrefois occupés par des forêts, bénéficieraient d’un ajout stratégique d’arbres qui permettrait de rehausser la productivité agricole et d’enrichir les services écosystémiques.
Pour avancer sur la bonne voie, il faudra adopter de nouvelles politiques qui prennent en compte l’interdépendance de l’agriculture et des forêts. Certes, nombre de pays ont commencé à intégrer l’agroforesterie dans leurs plans climatiques nationaux, mais nous devons pouvoir compter sur un engagement plus large en faveur de politiques qui reconnaissent le rôle essentiel des forêts pour la sécurité et la diversité alimentaires.
Cela vaut également pour le secteur privé, qui doit s’engager à ne pas recourir à la déforestation dans les chaînes de valeur agricoles, et dont les engagements devront se traduire en mesures concrètes assorties de résultats mesurables.
Enfin, il apparaît également fondamental de sensibiliser les consommateurs à la nécessité de s’alimenter plus sainement et d’adopter un mode de vie sain dans le cadre de systèmes agroalimentaires durables, ainsi que de réduire les pertes et le gaspillage de nourriture.
Les forêts jouent un rôle déterminant pour ce qui est de transformer les systèmes agroalimentaires mondiaux afin de les rendre plus efficaces, plus inclusifs, plus résilients et plus durables.
Dès lors que les forêts, en tant qu’élément central des systèmes agroalimentaires, seront considérées comme indispensables à l’agriculture et au bien-être humain, nous deviendrons de plus en plus enclins à en prendre soin.
Nous devons promouvoir les forêts et leur fonction importante de passerelle vers une action intégrée dans le cadre des quatre améliorations, qui visent à améliorer la production, la nutrition, l’environnement et les conditions de vie, sans laisser personne de côté.
Assurer la conservation des forêts ainsi que leur gestion et leur exploitation durables n’est pas seulement un impératif environnemental: il s’agit d’une stratégie cruciale pour la sécurité et la diversité alimentaires. Et nous devons nous y tenir, sinon les objectifs de développement durable des Nations Unies relatifs à l’élimination de la faim et de la pauvreté et à la restauration des écosystèmes deviendront encore plus difficiles à atteindre ».

Bertrand TJANI

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *