Evoquant les 2.000 milliards Fcfa qu’aurait reçu la région du Sud Cameroun, pour ses investissements, un groupuscule de Camerounais émigrés regroupés autour du commissaire renégat Patrice Nouma, a cru devoir dresser une liste de projets que l’Etat aurait réalisé au profit de la « région des Boulou, Bassa, Bané, Ntoumou, Ewondo, Batanga, Fang, Mabéa, Yassa, Mvaé, Mgoumba et Pygmées ».
Le groupuscule cite ainsi la phase 1 Port de Kribi dont le coût est de 300 milliards Fcfa, phase 2 Port de Kribi : 420 milliards Fcfa, centrale à gaz Kribi : 175 milliards Fcfa, voirie Kribi : 30 milliards Fcfa, adduction d’eau Kribi : 33 milliards Fcfa, autoroute Kribi : 250 milliards Fcfa, hôtel Comice : 20 milliards Fcfa, usine manioc : 15 milliards Fcfa, usine tracteurs : 50 milliards Fcfa, Memvele : 420 milliards Fcfa, Mekim : 100 milliards Fcfa, route frontière Congo : 75 milliards Fcfa, et route Kribi Ebolowa : 150 milliards Fcfa.
« On ne sait pas très bien ce que ces gens recherchent exactement à travers une telle liste, mais il est très important que certains comprennent comment on juge l’investissement public par rapport à une population donnée, en le distinguant en deux catégories : l’investissement stratégique dont le but est de structurer la gouvernance de l’Etat ou l’économie nationale. Par exemple, le Sénat construit à 150 milliards de Fcfa à Yaoundé est un investissement réalisé dans la région du Centre, mais on ne saurait évidemment pas le comptabiliser comme un gain des communautés du Centre ! C’est un projet d’importance nationale qui n’est installée au Centre que parce que Yaoundé est la capitale du Cameroun, mais qui n’a aucun impact sur la vie des autochtones. », a indiqué l’économiste.
« De même, le port de Kribi ne saurait être comptabilisé comme un investissement en faveur du Sud, puisque sa localisation à Kribi est liée à l’existence des conditions d‘un port en eau profonde dont le Cameroun avait besoin ! Pour avoir un tel port, le Cameroun n’avait pas beaucoup d’option, en dehors de Kribi déjà construit et Limbé en projet. Il ne pouvait faire autrement et on ne saurait lui reprocher de ne l’avoir pas fait à Bagangté ou à Kaele », a poursuivi Dieudonné Essomba.
« Du reste, ce port ne sera pas nécessairement plus utile aux populations du Sud qu’aux populations d’ailleurs. Ce n’est pas les Ekang du Sud qui vont travailler dans le port, gérer la douane et les sociétés commensale à un port, ni même importer ou exporter préférentiellement. On y trouvera de tout le monde, et peut-être que ces Ekang ne seront qu’une petite minorité égarée dans une majorité d’allogènes agressifs et dominants », a-t-il expliqué.
« C’est d’ailleurs le lieu de mettre en garde sur un aspect méconnu de tels investissements stratégiques. Très souvent, ils apparaissent comme une source de malheur pour la population locale! Un barrage construit dans le pays Bassa peut avoir pour vocation de fournir l’électricité produite à Yaoundé et Douala, alors que les villages Bassa environnants n’ont pas d’électricité. Va-t-on dire que ce barrage est au profit des Bassa ? Pas du tout : le barrage est géré par des non-Bassa, les employés viennent d’ailleurs, et l’électricité approvisionne d’autres localités ! Les Bassa ne gagnent rien d’autre que la perte de leurs espaces cultivables, les maladies hydriques et même l’invasion des allogènes. Comment peut-on leur imputer un tel barrage comme acquis ? », s’interroge-t-il. Ces observations nous permettent d’entrer dans la seconde catégorie des investissements.
Investissements d’accessibilité
« Ce sont les projets qui ont une vocation clairement locale et visent à satisfaire les besoins des populations riveraines. On peut par exemple citer l’électrification rurale, l’amélioration des routes, la construction des écoles et des établissements scolaires, etc ».
« La caractéristique de ces investissements est qu’ils améliorent les indicateurs d’accessibilité de la population : distance moyenne par rapport à une école ou un dispensaire, nombre de localités électrifiées, dépenses moyennes de santé, nombre de lits par habitants, etc ».
« Cette différentiation permet de mieux comprendre comment on peut se retrouver avec des situations totalement loufoques. Une Région peut abriter tous les barrages du pays, mais avoir de très mauvais indicateurs d’accessibilité de l’électricité ».
« Le Sud-ouest abrite toutes les principales installations pétrolières du Cameroun et ce sont des investissements qui se chiffrent à des milliers de milliards. Néanmoins, aucun homme raisonnable ne peut en attribuer le bénéfice aux populations du Sud-ouest ? »
« En définitive, on ne mesure pas l’investissement en faveur d’une population en comptabilisant ce que l’Etat a réalisé sur son territoire, mais en évaluant ses indicateurs d’accessibilité aux diverses commodités de la vie moderne ».
« Il faut raison garder. Dans le cas des investissements réalisés au Sud, très peu sont dirigés en faveur des populations locales et en termes d’indicateur d’accessibilité, le Sud traîne de très mauvais chiffres. Il n’est dépassé que par l’Est et les Régions du Grand Nord, alors que la Région la mieux placée en termes d’indicateurs est bien l’Ouest où ne se situe cependant aucun investissement stratégique ».
« J’ai souvent mis en garde la Diaspora-racaille qui prétend combattre Biya en faisant feu de tout bois. Ce n’est pas avec ces techniques grossières et puériles qu’ils vont chasser Biya d’Etoudi, bien au contraire. C’est même cette logique systématique de mensonges les plus éhontés et de manipulations les plus grotesques qui les a décrédibilisés et renforcé le pouvoir de celui qui fut étudiant de l’Institut des Hautes Etudes d’Outremer (IHEOM) dans les années 1950 et dont le diplôme est Administrateur des Colonies de la France d’Outremer ».
Maurice ONANA